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L’intégration de la responsabilité environnementale des entreprises dans le Droit OHADA

La responsabilité environnementale des entreprises (RE) est l’un des trois grands piliers de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE).

C’est un dispositif qui permet la prévention et la réparation des dommages environnementaux dont sont responsables les entreprises.

Cette dernière résultait à l’origine d’une démarche volontaire des entreprises et relevait du Soft Law. (1)Toutefois, elle a fait l’objet d’une intégration progressive dans le droit dur de divers Etats et Organisations internationales.

C’est pourquoi, il convient d’analyser l’opportunité et les modalités d’intégration des normes encadrant la responsabilité environnementale des entreprises dans le droit OHADA.

I La nécessité de l'intégration des normes encadrant la responsabilité environnementale des entreprises (RE) dans le droit OHADA

Au sein de l'espace OHADA, le législateur communautaire réfléchit actuellement sur un projet de réforme visant l'intégration des enjeux de la RE dans son droit. La nécessité de cette démarche se manifeste par l’existence d’une corrélation entre la finalité du traité de Port-Louis de 1993 (instituant l'organisation pour l'harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA)) et les avantages que pourraient apporter la mise en place des normes de responsabilité environnementale dans le droit OHADA(2). Cela signifie que, l’organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA) a été mise en place afin de favoriser le développement économique, l’instauration d’une sécurité juridique et judiciaire ainsi que l’attractivité de son espace auprès des investisseurs extérieurs(3). La responsabilité environnementale des entreprises a avant tout, une finalité préventive. Son objectif premier est de prévenir les atteintes contre la faune et la flore. Ainsi, la mise en place de cette responsabilité juridique dans le droit OHADA permettra au législateur communautaire de promouvoir une transition écologique réussie dans son espace.

Or, la promotion du développement durable par un Etat ou une organisation régionale constitue un gage d’attractivité.

Donc, intégrer des normes encadrant la responsabilité environnementale des entreprises au sein du droit OHADA, permettra au législateur communautaire de rendre plus attractif son espace auprès des investisseurs étrangers.

Aujourd’hui, la question du développement durable est devenue incontournable partout dans le monde. Le 23 juin 2021, le centre du commerce international (ITC) qui est un organisme conjoint de l’ONU et de l’organisation mondiale du commerce (OMC) a publié un rapport selon lequel « 68% des entreprises d’Afrique subsaharienne affirment que les enjeux environnementaux sont importants pour leur activité (4)».

Ainsi, afin de répondre aux inquiétudes des entreprises africaines, le législateur communautaire doit intégrer des normes favorisant la protection de notre biodiversité dans sa législation. Il faut ajouter que cela lui permettra aussi de ne pas être distancé par les autres organisations communautaires et internationales en matière de protection de l’environnement.

Si la nécessité de l’intégration de la responsabilité environnementale dans la législation OHADA parait évidente les modalités de sa mise en place donnent lieu à plus de réflexion.

I Les modalités d'intégration de la responsabilité environnementale des entreprises dans le droit OHADA

Tout d’abord, il faut mentionner que le Droit OHADA encadre déjà mais de manière très limitée la responsabilité environnementale des entreprises. Ainsi, l’acte uniforme relatif au système comptable (SYSCOHADA) impose aux entreprises de fournir des informations portant sur les enjeux environnementaux(5).

Toutefois, cette disposition est insuffisante, car elle n’impose pas aux entreprises de publier ces informations. Ainsi, elle ne permet pas de prévenir et de réparer les dommages environnementaux causés par les entreprises. Cette disposition mérite d’être renforcée. Il faudrait mettre en place un système de « bonus-malus » qui récompense les non-pollueurs et qui sanctionne les gros pollueurs.

Ensuite, il convient de préciser que l’intégration de la responsabilité environnementale des entreprises dans le Droit OHADA peut se faire de diverses manières.

1- La mise en place d’une charte RSE ou l’introduction de règles de droit international privé par un mécanisme de renvoi au droit interne des différents Etats membres

K. DIAWARA et S. LAVALLEE proposent deux solutions, l’une consiste à introduire des règles de droit privé internationales sur la responsabilité sociétale des entreprises dans le droit OHADA en prévoyant un mécanisme de renvoi dans un texte de loi. L’autre consiste à mettre en place une charte qui contiendrait des principes directeurs OHADA en matière de responsabilité sociétale des entreprises. Pour élaborer cette charte, un comité transnational sur la RSE serait créé. Ce dernier élaborerait un projet après avis des parties prenantes des pays membres(6).

Toutefois, il convient de se demander quelle serait la force obligatoire d’une telle charte. En principe une charte est dépourvue de valeur contraignante.

2- Une intégration via la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement :

Il est possible d’intégrer la responsabilité environnementale des entreprises dans le droit OHADA via la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement conformément à l’article 27 du Traité relatif à l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA), révisé en 2008. Cette disposition qui institut la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement prévoit à son alinéa 3 que cet organe « est compétent pour statuer sur toute question portant sur le traité ». L’article 2 du traité relatif à l’OHADA précise ce que le législateur a voulu exprimer par les termes : « toute question portant sur le traité ». Ce sont toutes les questions relatives au droit des affaires, celles qui lui sont connexes ou « toutes autres questions que le Conseil des ministres déciderait d’y inclure parmi les autres matières ».

La responsabilité environnementale des entreprises est une matière liée au droit des affaires ou pouvant être incluse dans les autres matières. Celle-ci peut donc être intégrée dans le droit OHADA via la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement.

Il convient de préciser que les Etats membres de l’organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA) ont adopté des règles communes appelées actes uniformes qui régissent presque toutes les matières relatives au droit des affaires. La plupart de ses actes uniformes nécessitent d’être reformés pour garantir une réelle protection de notre environnement. Toutefois, comme l’intégration de la responsabilité environnementale dans divers actes uniforme n'est pas pratique à cause de la multiplicité de ces derniers, il serait judicieux pour le législateur communautaire de mettre en place un seul acte uniforme qui va traiter cette question pour toutes les matières concernées(7).

Il serait donc préférable d’intégrer la responsabilité sociétale des entreprises dans le droit OHADA par la conférence des chefs d’Etat et de gouvernement puisqu’un tel procédé n’aurait pas une valeur symbolique mais contraignante. Cela pourrait se concrétiser par l'adoption d'un acte uniforme relatif à la responsabilité sociétale des entreprises. Cet acte uniforme préciserait les obligations et interdictions auxquelles les entreprises seront soumises en matière de responsabilité environnementale. Cela peut être l’interdiction de déverser des produits toxiques dans l’environnement ; l’obligation de produire un bilan d’émission de gage à effet de serre et un plan de transition pour réduire ces émissions...

De plus, il faudrait prévoir des amandes administratives dont seront redevable les entreprises qui ne conformeront pas à ces obligations et interdictions dans un délai donné.

En conclusion, il est plus que temps pour le législateur communautaire de mettre en place cette réforme tant attendue afin d’intégrer la responsabilité environnementale dans le Droit OHADA. Une telle démarche permettrait non seulement d’encourager « les non-pollueurs » mais aussi de protéger la biodiversité du continent africain contre les dérives des gros pollueurs.

Abdourahamane II BAH
Juriste en Droit de l’entreprise

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(1) « RSE, Droit souple et Droit dur... » Elisabeth SAUBADU 2019-11-07

(2) « La responsabilité sociétale des entreprises dans la gouvernance des sociétés en Droit OHADA », GERVAIS MUBERANKIKO Edition N° 34 du 11 juin 2020

(3) Traité relatif à l’OHADA du 17 octobre 1993, révisé en 2008

(4) « Afrique : la menace environnementale préoccupe les PME subsaharienne » ONU INFO, 23 Juin 2021

(5) Acte uniforme relatif au système comptable OHADA

(6) « Responsabilité sociétale de l'entreprise (RSE) dans l'espace OHADA : pour une ouverture aux considérations non économique », K. DIAWARA et S. LAVALLEE, De Boeck Supérieur, Revue Internationale de droit économique, 2014/4

(7) « Quelle intégration de la RSE dans le droit OHADA ? Pierre-Samuel GUEDJ, 23 mars 2O23

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Sources :


« Quelle intégration de la RSE dans le droit OHADA ? Pierre-Samuel GUEDJ, 23 mars 2O23

« Responsabilité sociétale de l'entreprise (RSE) dans l'espace OHADA : pour une ouverture aux considérations non économique », K. DIAWARA et S. LAVALLEE, De Boeck Supérieur, Revue Internationale de droit économique, 2014/4

« RSE, Droit souple et Droit dur... » Elisabeth SAUBADU 2019-11-07

« La responsabilité sociétale des entreprises dans la gouvernance des sociétés en Droit OHADA », GERVAIS MUBERANKIK Edition N° 34 du 11 juin 2020

« Afrique : la menace environnementale préoccupe les PME subsaharienne » ONU INFO, 23 Juin 2021 Traité relatif à l’OHADA du 17 octobre 1993, révisé en 2008, articles, 2, 3 et 27
Acte uniforme relatif au système comptable OHADA, note 35

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    Abdourahamane BAH

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